La centrale nucléaire du Bugey
Le 10 février dernier, le Président de la République a annoncé sa volonté de construire quatorze réacteurs EPR d’ici à 2050.
Pour justifier sa relance du nucléaire, le chef de l’État prétend s’être appuyé sur une lecture rigoureuse des experts. Mais il a écarté les analyses provenant de l’ADEME parce qu’elles ne vont pas dans le sens de l’atome à tout-va. Et il se joue des rapports RTE.
Dans son discours, M. Macron a prétendu se fonder sur « ce qu’expliquent les experts », assurant les avoir « lus rigoureusement ». En fait, le président de la République a eu une lecture très sélective…
Comme l’a rapporté Jade Lindgaard dans Mediapart, un rapport de l’ADEME a vu sa publication repoussée pour ne pas interférer avec le discours du président. C’est ce que craignait Mathieu Orphelin, député écologiste et ancien haut cadre de l’ADEME, dans un communiqué du 10 février : « Il semblerait que le ministère ait une nouvelle fois demandé à l’ADEME de décaler la sortie de ses scénarios sur le mix électrique, pourtant prévue pour début février. »
En effet, ce document d’expertise officielle conclut très différemment du président-candidat : étudiant différents scénarios énergétiques, il conclut que les options comportant à l’horizon 2050 la construction de nouveaux réacteurs nucléaires sont plus coûteuses que les options basées sur la sobriété énergétique et les énergies renouvelables. Le travail des « experts » évoqué par le chef actuel de l’État contredit donc clairement la rationalité de construire quatorze nouveaux réacteurs d’ici 2050.
M. Macron a choisi le rapport qui lui convenait
Mais M. Macron n’a pas seulement éludé une expertise officielle, il a choisi un scénario qui n’a pas — non plus — été publié. En effet, dans son discours du 10 février, il affirme que « nous devons être en mesure de produire jusqu’à 60% d’électricité en plus qu’aujourd’hui », soit 800 TWh en 2050. C’est un chiffre très élevé qui correspond à la projection du scénario « Réindustrialisation » étudié par RTE, mais dont les détails n’ont pas été publiés.
À l’époque (octobre 2021), les grands médias avaient repris l’idée que le nucléaire était inévitable, préparant le terrain aux annonces de M. Macron. Mais celui-ci va encore plus loin en s’appuyant sur une étude non publiée. Des choix majeurs auront donc été faits sans une discussion publique mettant clairement sur la table tous les éléments du dossier.
Ce texte est une synthèse de cet ARTICLE paru sur le site de Reporterre.